Encore un roman passionnant, plus léger que les autres en apparence, puisqu’il traite de la passion amoureuse, mais peut-être le plus cruel de la série des Rougon Macquart.
Hélène Grandjean, fille du chapelier Mouret, est veuve et vit à Paris avec sa fille Jeanne, une enfant maladive qui souffre de crises nerveuses. Toutes deux mènent une existence très retirée. L’enfant est très possessive, et réclame la présence constante de sa mère à ses côtés. Lorsque Hélène s’éprend du docteur Deberle, venu soigner Jeanne pendant une de ses crises, la petite fille le devine, et, par dépit, s’expose au vent et à la pluie. Elle contracte une fluxion de poitrine qui évolue en phtisie galopante et l’emporte en trois semaines.
Dans Une page d’amour, l’ironie de Zola est moins mordante. Cependant, elle transparaît dans le portrait peu flatteur de Madame Deberle, l’épouse du docteur, présentée comme une femme capricieuse et sans cervelle.
Lorsque Madame Deberle apprit la mort de Jeanne, elle pleura, elle eut un de ces coups de passion qui la mettaient en l’air pendant quarante-huit heures. Ce fut un désespoir bruyant, hors de toute mesure. Elle monta se jeter dans les bras d’Hélène. Puis, sur un mot entendu, l’idée de faire à la petite morte des funérailles touchantes, s’empara d’elle et bientôt l’occupa toute entière. Elle s’offrit, elle se chargeait des moindres détails. [...]
Alors, sans perdre une minute, Mme Deberle se donna un mal infini. Elle employa la journée du lendemain à courir chez toutes ces dames, pour leur apprendre l’affreuse nouvelle. Son rêve était d’avoir un défilé de petites filles en robe blanche. Il lui en fallait au moins trente, et elle ne rentra que lorsqu’elle eut son compte. Elle avait passé elle-même à l’administration des Pompes funèbres, discutant les classes, choisissant les draperies. On tendrait les grilles du jardin, on exposerait le corps au milieu des lilas, déjà couverts de fines pointes vertes. Ce serait charmant.
À suivre : Nana
Madame Bovary